Aux lecteurs

Crédits: CatherinePaquette

Photo: Catherine Paquette

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Depuis que j’ai publié Nous étions le sel de la mer, l’univers qui l’anime me manque.

Tant qu’un roman n’est pas déposé, l’auteur a le loisir de jouer avec ses personnages (faire exploser une tomate de plus entre les mains de Renaud? ajouter des étoiles aux nuits d’Yves Carle? un autre étage aux mentons du notaire Chiasson?) Dès que le livre part pour l’imprimerie, c’est terminé: ils se figent et nous quittent pour rejoindre les lecteurs.

Mario Vargas Llosa, dans ses Lettres à un jeune romancier, dit qu’on écrit parce qu’on vit une « insatisfaction intime vis-à-vis de la vie véritable ». Il ajoute que cette insatisfaction est encore plus grande quand on quitte la fiction pour revenir dans le réel, car nous sommes alors confrontés « à ses limites et ses imperfections ».

Depuis un an, je travaille sur un projet de recherche/écriture lié à l’univers militaire. Chaque fois, ces jours-ci, que je me penche sur mon clavier pour tenter de raconter les histoires que les militaires m’ont confiées, je me retrouve confrontée à la guerre. À celle qui hante les souvenirs de ceux qui sont allés en Afghanistan, à celles qui enflamment l’Ukraine, la Russie, et bombardent la bande de Gaza…

Saint-ciboire de câlisse que j’aimerais ça retourner dans cette Gaspésie imaginaire où Vital remonte le soleil levant dans ses filets, où Cyrille attend sa dernière pêche, où Moralès retrouve la grâce de l’amour!

Entre ces personnages fictifs qui me manquent et le réel cassant qui m’entoure, je suis comme Renaud, toujours en train de mettre et d’enlever mon petit chapeau ridicule d’auteur en me demandant à quoi ça sert d’écrire.

Et là, tout d’un coup, je reçois le mot inattendu d’un lecteur, d’une lectrice qui me raconte qu’il ou elle a aimé telle scène ou tel personnage parce que ça l’a fait rêver, rire ou voir la Gaspésie autrement…

Alors, je me dis que la fiction ne se fige pas quand le livre part en impression, que mes personnages restent encore vivants et que l’écriture a du sens si elle permet d’ouvrir, envers et contre les bombardements du réel, un espace de silence pour ceux et celles qui rêvent de réentendre, même dans leur salon, les murmures délicats de la mer.

Merci pour vos mots si gentils.

Été 2014.

Recherche en cours avec les militaires.

23 réflexions sur “Aux lecteurs

  1. Marie ange Arseneault 23 juillet 2014 / 17:03

    Je n’ai pas encore reçu ton dernier livre mais j’ai reçu celui (. en terrain mine. Je ne l’ai pas fini mais je le trouve très très beau. Quand tu fais la lecture d’un livre et que tu as déjà rencontré l’auteur c’est bien plus intéressant. Je me trouve choyée de t’avoir rencontrée.

  2. Steeve Landry 2 octobre 2014 / 13:53

    En retard, je termine la lecture de « Nous étions le sel de la mer » dans les prochains jours. Étant Gaspésien d’origine, j’ai aimé dès les premières pages. Chaque village a son tas d’histoire dans le péninsule et vous m’inspirez pour l’écriture d’un premier roman.

  3. Laura Filisetti 4 avril 2015 / 11:10

    Bonjour Roxanne! J’ai été une de tes élèves à Joliette et Nous étions le sel de la mer est le deuxième livre que je lis de toi… Chapeau! J’ai adoré ton écriture qui a beaucoup de poésie et d’âme et tout l’univers des marins que je trouve fascinant. Ça fait du bien de lire une écrivaine de qualité! Merci pour ton livre, j’ai vraiment passé un beau moment et j’ai hâte de lire ce que tu prépare sur les militaires!

  4. Suzanne Lalancette 20 Mai 2015 / 21:31

    Il y a quelques années j’ai lu avec un grand plaisir Whisky et Paraboles. J’ai vraiment eu un coup de coeur pour ce livre, son histoire mais aussi pour la beauté du texte. Et voilà que je viens de lire: Nous étions le sel de la mer et encore une fois j’ai adoré la qualité du texte et la douceur des mots. Tu as une façon merveilleuse d’écrire, je tombe amoureuse de tes textes à chaque fois. Merci de faire ce métier et je me dirige vers ma biblio de quartier pour te lire à nouveau…dans une autre histoire!

    • Roxanne Bouchard 21 Mai 2015 / 08:48

      Vous êtes tombée sur les deux livres que j’ai concoctés en cachette, pour me faire plaisir; ceux que j’ai pris des années à écrire. Les autres ont été écrits plus rapidement, car ils étaient commandés par des éditeurs qui avaient fixé des dates de parution en me les demandant. Ils sont peut-être moins poétiques parce que je cherchais plus d’efficacité (dans le rythme, l’humour, l’information). Vous saurez me le dire.

  5. Catherine L. 24 juillet 2015 / 14:15

    J’viens tout juste de terminer « Nous étions le sel de la mer ». En fait, je l’ai carrément dévoré d’un bout à l’autre en … 3 jours et j’en aurais remandé ! Quel univers fantastique vous avez créé qui m’a permis de voir la mer en me fermant les yeux et de sentir son odeur saline. Merci de m’avoir fait éclater de rire, de m’avoir fait frisonné et de m’avoir fait monter, à certains passages, les larmes aux yeux. J’ignore si c’est parce que moi aussi je me prénomme Catherine, ou si c’est parce que moi aussi l’ancre est difficile à attacher, mais j’ai tout simplement succombé à votre oeuvre. Continuez, c’est nécessaire pour l’humanité.

  6. Carol Poulin 29 septembre 2015 / 21:57

    Il y a des livres qu’on voudrait qu’ils ne finissent jamais malgré notre empressement à savoir la fin. La Gaspésie je l’ai abordée en 66 sur le pouce et j’ai fini par vivre avec une de ses filles, de St-Siméon, rencontrée à Paris en 75. On y va se balader dans la neige et dans l’été depuis ce temps. Le vent salé qui coure sur la mer le matin et celui qui descend du sapinage le soir, il y seulement là-bas qu’on goûte ça. J’ai goûté votre poésie à travers les humeurs et les tourments des gens là-bas, que vous avez si bien saisi. Touché. Faites-moi signe au prochain voyage. Merci.

  7. Jacques Girard 11 septembre 2017 / 20:34

    J’ai terminé aujourd’hui ´Nous étions le sel de la mer’. On goute les embruns dans les paroles des personnages. Ca donne le gout d’y aller pour regarder passer le temps. Quel bonheur!

  8. Laberge 2 octobre 2020 / 10:22

    J’ai lu 5 balles dans la tête et en suis restée marquée. Quelle audace pour une anti-militariste, mais quelle bonne idée que de donner la parole et surtout d’écouter ces hommes qui parlent si peu. Vous nous faites bien comprendre leur mutisme habituel envers les civils. Mais leur camaraderie, leur sens de l’amitié sont émouvants. Leurs exploits semblent rester inconnus, leurs difficultés avec les Afghans et leur indifférence à la mort sont fort bien rendues. Les séquellesavec lesquelles ils reviennent sont épouvantables et nous font comprendre pourquoi tant d’entre eux ne peuvent continuer d’exercer leur métier.

    Et bravo pour les vignettes sur chacun de vos interviewés. C’est génial!

    Merci Roxanne d’avoir fait cette démarche pour nous. J’aurai désormais un grand respect pour ces soldats.

  9. Michèle Baril 28 janvier 2021 / 17:01

    J’ai lu et beaucoup apprécié les 2 enquêtes de l’enquêteur Morales.La Gaspésie et la mer y sont décrites de façon très poétiques et les personnages sont vivants. J’ai l’impression de les avoir connus. J’ai bien hâte à la prochaine enquête.

  10. Mimi Drouin 1 juin 2021 / 00:39

    Merci Madame Bouchard! Cette troisième enquête de Moralès est merveilleuse,sensible et très captivante. J’ai habituellement de la difficulté à lire la poésie, votre manière de l’écrire m’a fait voir les Iles avec de belles couleurs et images. Aurons-nous une quatrième enquête de Moralès? Est-ce possible d’en connaître un petit bout de l’intrigue…..

    • Roxanne Bouchard 1 juin 2021 / 09:29

      Chère Mimi,
      Merci pour votre mot.
      Oui, je suis en train de monter la quatrième enquête. J’aime beaucoup travailler les Moralès.
      Pour ce qui est de l’intrigue…. Mon chum crie: « Non! Non! Dis rien! »
      J’ai un peu peur qu’il refuse de préparer mon déjeuner si je m’ouvre la trappe…
      (Disons que je pense à des meurtres en séries dans la région de Percé.)
      Bon été!

      • Michel Pinard 19 février 2023 / 12:26

        Tellement hâte de lire ce 4ieme morales…..

  11. Hélène Veilleux 7 janvier 2022 / 14:05

    Bonjour Roxanne,

    J’ai commencé par lire La mariée de corail, dont j’avais entendu parler à la radio. Puis j’ai trouvé Nous étions le sel de la mer, que j’ai adoré : sa poésie, ses personnages forts et la relation entre le père et le fils, toute en retenue et pleine d’amour. Et j’ai eu envie de relire La mariée, pour l’enchaînement… pour respecter l’ordre de découverte des personnages.

    J’ai terminé mes trois lectures en quelques jours (vive la retraite!) et, à la fin, j’étais tellement envahie par votre histoire et vos personnages qu’ils ne voulaient plus me quitter! J’en avais la tête pleine! Même la nuit!

    Bravo pour la richesse de vos textes, l’atmosphère que vous avez su créer et les personnages attachants qu’on a envie de retrouver. C’est du grand art!

    J’ai hâte de me plonger dans Le murmure…

    Bonne continuation!

    • Roxanne Bouchard 7 janvier 2022 / 14:51

      Bonjour Hélène,
      Merci pour vos bons mots.
      J’espère que Le Murmure ne vous fera pas faire des cauchemars…
      Bonne année 2022 et de belles découvertes en lectures!

  12. Mireille La Salle 18 septembre 2022 / 13:16

    Je viens de terminer
    « Nous étions le sel de la mer ».
    J’ai adoré!
    Une écriture toute en images et en tournures de phrases.
    Un gros coup de coeur.
    Merci

  13. michel pinard 3 novembre 2022 / 12:39

    J,attends impatiemment le prochain morales en gaspésie je l,espère. Il est prévu?

  14. Claudette Savard 11 novembre 2022 / 09:36

    Bonjour chère madame Bouchard,
    C’est la deuxième fois que je lis « Nous étions le sel de la mer », étant rendue à un certain âge avançé, je n’ai sûrement pas l’esprit aussi vif que le jeunes, mais est-ce bien Vital Bujold le père de Catherine. Merci de me répondre

  15. rem1014daedc710a 24 janvier 2024 / 04:54

    Bonjour Roxanne. C’est en France, en Normandie que je viens de vous découvrir, grace à LaPresse.ca, mon lien quotidien avec le Québec….J’ai adoré le sel de la mer, les mots qui se transforment en images, les lèvres de Marie qui intimident par leur autant….le massacre du chou alors que des secrets sont dévoilés…..Va falloir que j’en fasse du kilométrage pour la bibliothèque où je trouverai la mariée de corail. Mais c’est pas grave, à moto y fait toujours beau ! Et faut que je trouve comment trouver les autres……Merci.

    René Michaud, Caen, France

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